La Légende de l’Or du Rhin est sans doute la plus grande épopée Germanique de la courte histoire de cette civilisation.
Pour une approche moins abrupte de ce récit, il est préférable de débuter la lecture de cet article par "la légende antique" dans la table des matières - NDLR.
Table des matières
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Présentation
Non pas qu’elle couvre le Hof tel les Eddas, ou enrichisse la connaissance des entités du Panthéon Antique telles les textes des Scaldes, non, mais elle est au cœur même de ce qui les a inspiré toute ! En effet l’Or du Rhin parle bien de l’Or.
L’Or qui est le plus fabuleux Kenning pour désigner et conceptualiser la quête Germanique.
Cette métaphore est là le secret même de cette civilisation.
A la fois car l’anneau métaphorique Andvarinaut incarne le Hof dans ce qu’il a d’inéluctable avec la guerres des Ases contre les Vanes puis du Ragnarök. Ensuite car il est le symbole historique de la genèse des peuples Germains jusqu’à leur perte.
L’Or du Rhin est donc la pierre philosophale, le Graal, l’Arche perdu, le trésor des Pharaons ou l’Eden de l’entière métaphysique des Germains. Il est le Wyrd, le Destin de cette aube de l’humanité… jusqu’à son crépuscule !
Naissance de la Légende
Mais qu’est-ce que l’Or du Rhin ?
En fait il serait même plus à propos, pour rester dans la métaphore Scaldique, de nommer cette épopée l’Ambre Germanique.
Car l’Or s’il est cherché et convoité par tous les peuples était pour les Germains de peu de valeur au côté de l’Ambre qu’ils sacralisaient. Comme on l’a dit ce trésor n’est autre que le secret partagé par les premiers peuples d’Europe, en fait le sens de leur culture, le Destin.
Un Destin que l’on doit affronter sans craintes mais sans espoirs non plus. L’Homme n’aura eu de cesse d’avoir l’insolence de croire pouvoir maîtriser et dompter sa destinée. Une quête héroïque vouée à l’échec car il est inéluctable et seulement décidé par les Nornes, les Dieux mêmes en étant sous le joug.
Mais au travers de son acceptation, de sa philosophie, des entités l’incarnant, des Runes l’interprétant et par le sens que les entités du Hof lui donnent, les Germains trouvèrent en lui une vérité pure et incroyable. Une richesse qui fut convoitée dés lors sans cesse par les Romains qui les nommèrent « Barbares ». Et où ils avaient raison c’est que la signification de ce terme péjoratif voulait dire qu’ils étaient différents et étrangers.
Oui ils formaient ainsi donc une civilisation tombée dans l’oubli depuis, leurs cousins Celtes les ayant même supplantés.
Car le Germain, « le Frère », n’est pas aimé. On ne reviendra pas sur les causes multiples, qu’elles soient religieuses, nationalistes, obscurantistes ou farfelues. On pourrait tout de même se poser la question pour quelle raison on connaît plus les Pharaons ou les Dieux Grecs que ceux de notre propre culture ?! L’amalgame ayant fait du Germain un Allemand cruel pendant les deux guerres ? Certainement oui. Wagner et son nationalisme occultant l’histoire réelle ? Sans doute.
Les Origines
Pourtant, oui pourtant, la plus extraordinaire Légende plongeant au cœur de cette civilisation, l’Or du Rhin, est née en Europe, et a trouvé sa création en France, oui en France ! Non pas Allemand donc, mais bien Française au royaume des Francs et des Burgondes !
Et c’est là toute l’erreur communément transmise depuis des Siècles.
Les héros de cette Légende ne sont pas plus Allemands que Français ou encore Hongrois, Islandais, Anglais, Polonais ou Suédois. Non, ce récit exprime simplement le secret de l’Europe du début de notre ère, oubliée ou méconnue.
Et ce secret n’est autre que le mythe de nos racines.
Un mythe qui s’il est incarné dans ce fameux trésor convoité de tous, fut caché dans un coffre à jamais trouvé… celui le plus inattendue et pourtant si proche : en nous-même, dans notre cœur et dans notre âme !
La transmission
L’Or du Rhin trouve ses sources bien sûr dans des légendes orales chuchotées depuis fort longtemps et dont peu de traces complètes sont arrivées jusqu’à nous.
Mais ces murmures ont été consignés au début du XIIIe Siècle, en Autriche, sous le nom de la légende des Nibelungen ou l’Anneau des Nibelung. Son héros est Siegfried, magnifié en une sorte de paladin souvent naïf, un héros sans doute bien différent du mythe premier.
Car en fait la véritable histoire se situe au Ve Siècle en Burgondie. Et le héros était bien Germain, se nommait Sigurd, plus proche du Berserker des textes Scaldiques que du bon guerrier courtois de la chevalerie mais un Einherjar sans nul doute, et le contexte était celui préparant à la bataille ultime des légions Romaines d’Aetius et des troupes Germaniques menées par Attila !
Ce Ragnarök, prévu par la prophétie de la Völuspà, et parachevé par celle de l’Anneau des Nibelung, en est là toute la saveur.
On verra que les acteurs de cette épopée et les analogies historiques ne peuvent qu’émettre peu de doutes quant à cette inspiration historique…
Un nécessaire décryptage est dès lors indispensable pour bien comprendre que le fond de cette légende est plus importante que le récit en lui-même. Car on ne peut réellement dater ou attester qu’une nation ou un peuple en soit à l’origine.
Cette épopée comme on l’a dit est une finalité à un mélange épars de vieux chants oraux, de fragments de poésie, de syncrétisme européen, d’influences au travers des peuples l’ayant inspiré et interprété… jusqu’au mythe donc !
Un double mythe où se côtoie Sigurd et Siegfried comme une genèse et une apocalypse…
La Légende
Siegfried et la cour de Burgondie
Siegfried désirant partir à l’aventure avant de régner prend un jour connaissance qu’une fille à la beauté sans pareille vit en Burgondie. Elle se nomme Kriemhild. Désirant l’épouser il arrive donc en son royaume accompagné de douze cavaliers.
Peu de temps après le royaume de Burgondie est menacé par deux frères, le Roi Saxon Liudegêr et le Roi Danois Liudegast, lançant un ultimatum à Gunther. Ce dernier peu valeureux demande conseil à Hagen qui lui intime l’idée d’enrôler Siegfried.
Et celui-ci les vaincra.
Accueilli donc en héros à son retour il devient un intime de la cour. Kriemhild est très proche de lui mais vint la nouvelle qu’une Reine à la beauté insensée vit au large de l’Océan. Gunther désirant trouver une épouse décide d’aller à sa rencontre.
Toutefois trois épreuves sont nécessaires pour conquérir la belle. Alors Gunther fait de nouveau appel à Siegfried qui cette fois lui fait promettre que s’il l’aide alors il épousera sa sœur.
Accord est passé et Siegfried, Hagen, Gunther et un guerrier du nom de Dancwart partent.
Siegfried et Brunhild
Grâce à l’un de ses artefacts Siegfried se mystifie et, alors invisible, épaule Gunther qui panique à l’idée d’affronter les épreuves de la Reine convoitée, la belle Brunhild.
La première épreuve est un combat à la Lance qui ne donnera pas de vainqueur précis. La seconde est de jeter une lourde pierre le plus loin possible puis de sauter par-dessus là encore au plus loin.
Cette fois Siegfried-Gunther bat facilement la Reine, vexée.
La Reine s’incline néanmoins et promet son cœur à Gunther.
A partir de ce moment le récit fait partir Siegfried sur les flots jusqu’aux pays des Niebelungen.
Là on apprend qu’il maîtrise le Nain Andvari, réuni milles guerriers puis retourne en Islande !
Brunhild en Germanie
Le voyage du retour est entrepris et Brunhild arrive à Worms en Burgondie.
Le mariage est prononcé, sans cérémonie spirituelle. En fait un double mariage car Siegfried obtient la main de la sœur du Roi. Alors la nouvelle Reine, Brunhild, se voit fort contrarié et le fait savoir à son mari, qu’un simple guerrier tel que Siegfried épouse sa désormais belle-sœur. Une mésalliance insupportable à l’époque… du récit ! Car cela n’est pas vrai chez les Germains, ou moins grave.
Et à partir de ce moment Gunther ment de plus belle.
Si le mariage est consommé par Kriemhild et Siegfried, il n’en est rien pour Gunther. Ne parvenant à ôter la ceinture de force de Brunhild il est même ridiculisé par la vierge qui le ligote ! Elle lui fait part alors qu’elle veut connaître le secret liant Gunther à Siegfried avant de s’offrir…
Alors encore une fois le Roi va mander l’aide du héros qui va se substituer à lui, dans le noir, et maîtriser la Valkyrie lui ôtant sa ceinture et son anneau !
La traîtrise de Siegfried et Gunther
Le temps passe alors…
Pourtant un jour, les deux héroïnes du récit, se lavant dans le Rhin, en viennent à se disputer. Brunhild moque Siegfried qui n’est pour elle qu’un vassal. Alors, en colère, Kriemhild se fâche et la raille à son tour lui avouant que c’est son mari qui l’a maîtrisa la fameuse nuit où elle perdit sa virginité !
La trahison est à jour.
Le meurtre de Siegfried
Et à partir de ce moment Brunhild voue de la haine à Siegfried qu’elle rend responsable de ce gâchis. Gunther, sous l’influence de Hagel, est lui-aussi décidé à la vengeance. Et c’est Hagen, le plus virulent et mauvais, qui décide d’en être l’exécutant.
Gunther va alors attirer Siegfried loin du royaume prétextant d’aller repousser des Saxons pendant qu’Hagen va faire révéler par Kriemhild le point faible du héros. Elle lui fait part qu’il n’est vulnérable qu’entre les épaules, là où elle brode sur tous ses vêtements une petite croix d’or !
Les Saxons demeurant introuvable, une partie de chasse est prévue en contrepartie sur l’idée de Hagen tout juste arrivé. Des joutes sont organisées également ainsi que des courses entre les guerriers… alors Siegfried assoiffé s’en va se désaltérer prés d’un cours d’eau.
Se baissant pour laper, il ne voit que trop tard le reflet d’Hagen qui lui enfonce sa lance au travers de son seul point vulnérable !
La dépouille est ramenée à Worms où Kriemhild pleure à la fois sur cette perte et plus encore par la trahison de son frère et de Hagen, comprenant leur complot. Brunhild, elle, est vengée… mais le récit est tronqué car à ignorer la relation de Siegfried et de la Valkyrie bien avant toute cette histoire on l’ampute d’une grande partie de son intérêt !
La vengeance des femmes
Donc le récit s’ouvre là sur la Vengeance de Kriemhild devenant l’héroïne de la Légende.
Kriemhild conserve donc l’anneau d’Andvari, le trésor de son défunt mari. Seulement Hagen va lui voler l’anneau et le cacher sur la rive du Rhin, n’en confiant l’endroit qu’à Gunther.
Bien plus tard, Kriemhild va chercher un homme de pouvoir pour l’aider à sa vengeance, le fameux Etzel, en fait Attila !
Réussissant à convaincre Gunther de l’accompagner avec Hagen et ses guerriers à la cour de son mari Attila, là Kriemhild fomente sa vengeance. Mais Attila refuse de tuer son beau-frère !
Alors la Reine va utiliser son propre fils en lui disant d’aller humilier le maléfique Hagen, qui fout de rage, décapite l’enfant ! On devine la suite…
Tous les Burgondes seront massacrés et Gunther puis Hagen seront fait prisonnier par le compagnon d’Attila, le fameux allié Théodoric II…
Les deux prisonniers refusant de dire où se trouve le trésor du Rhin, Kriemhild finira, ivre de haine, par les tuer tous les deux ! Alors l’Or du Rhin est définitivement perdu…
La Légende Antique
Ce récit, certes intéressant, on le voit bien manque du principal… le Mythe !
On dirait même que l’auteur ait occulté le plus fondamental, la malédiction de l’anneau ! Heureusement si on a là un intérêt pour le contexte de l’Or du Rhin, les vieux textes Scandinaves, eux, permettent d’en redonner toute la vigueur en lui apportant les scènes manquantes et pourtant les plus merveilleuses et légendaires. On parle là de l’Edda, des textes Scaldiques et du Völsungasaga, le Nornagest ou encore le Thidrekssaga.
Les personnages
A partir de ce moment les acteurs donc changent de nom mais restent les mêmes qu’avant :
Le Mythe
La lignée des Völsungs
Tout débute par l’existence du personnage nommé Volsung, présenté comme petit-fils d’Odin !
On sait qu’il a dix fils et une fille, Signy, l’aîné lui s’appellant Sigmund
Signy sera d’ailleurs marié contre son gré par son père au Roi des Goths, Siggeir.
Alors au banquet vient, déguisé comme à son habitude, le Dieu borgne, Odin. Il fiche alors une épée dans un tronc d’arbre et clame que celui qui parviendra à la retirer gagnera là gloire et surtout une arme sans pareille !
(On voit là la fameuse légende d’Excalibur trouvant écho à celle-ci)
Sigmund
Et là le premier drame est fomenté. Car seul Sigmund parvint à retirer la fameuse arme déclenchant la jalousie de Siggeir qui piègera toute la famille de sa femme. Tuant Völsung, il fit attacher ses fils dans une forêt, une louve les dévorant un à un chaque nuit. Une louve présentée comme la mère de Siggeir d’ailleurs !
Toujours est-il que Signy parviendra à libérer un des frères, Sigmund en fait, préparant dés lors sa vengeance.
Vivant alors en marge des hommes, Sigmund est chargé par sa sœur d’évaluer ses deux fils en vue de leur vengeance. Incapables, Sigmund finit par les tuer ! Alors Signy va prendre l’apparence d’une autre femme, couché incestueusement avec son frère et plus tard donner naissance à un fils, Sintfjötli, qui sera élevé par Sigmund… dans la tradition Berserker !
Alors les deux compères mettent le feu au château de Siggeir qui y périra. Toutefois sa femme, Signy, préférera, pour respecter le serment engagé auprès de son époux, périr avec lui non sans avoir révélé la vérité sur Sintfjötli à son père…
Sigmund au Frakland
Le fils et le père donc retournent alors au pays de Völsung, le Frakkland : le Pays des Francs !
Sigmund y prend femme, Borghild, qui déteste Sintfjötli jusqu’à l’empoisonner ! Désirant l’enterrer de l’autre côté du Rhin, le passeur prenant la dépouille disparaît alors aussitôt, en fait Odin emportant le fils au Valhalla… Sigmund fait bannir alors Borghild.
Sigmund, grâce à son épée, devient ensuite un Roi puissant et trouvera une nouvelle épouse plus royale, Hjördis, fille du Roi Eylimy pourtant convoité par Lyngwi, le fils du Roi Hunding, qui déclenche alors une guerre ! Sigmund qui terrasse ses ennemis facilement se voit alors contrarier par Odin lui-même !
La mort de Sigmund
Le Dieu et ses Valkyries détruisent l’armée de Sigmund et Odin le transperce de sa lance après lui avoir briser son épée !
Sigmund agonisant est rejoint alors par sa femme Hjördis, alors enceinte. Celui-ci lui prophétise qu’elle donnera naissance au plus incroyable héros des temps et qu’il reforgera son épée qu’il nommera alors Gram.
A partir de ce moment, Hjördis fuit le royaume grâce au Drakkar du Roi Viking Alf, fils du Roi de Norvège, Hjalprek.
Après la naissance de son fils elle l’épousera. Peut-être pour ne pas contrarier son mari, elle confie l’enfant, nommé Sigurd, à un forgeron, Regin, fils de Hreidmar, qui lui enseignera l’art du combat, de l’artisanat, de la culture du Hof et même des Runes !
L’Anneau maudit
Sigurd est donc confié à Regin.
Un jour celui-ci lui demande d’aller s’acquérir d’un cheval auprès du Roi. Envoyé aux écuries il fait la rencontre d’un vieil homme étrange qui lui confie un splendide coursier, du nom de Grani, qu’il dit descendant du mythique Sleipnir ! En fait cet homme n’est autre qu’Odin…
(Toute cette légende se trouve dans le Reginsmal, « La Ballade de Regin »)
Alors Regin dit à Sigurd qu’il est désormais prêt pour aller chercher fortune… et Regin de narrer son histoire, l’histoire de l’Anneau :
Andvarinaut
Le tribut des Dieux
Regin était avec ses frères Otr, un chasseur capable de prendre l’apparence d’une loutre, et Fafnir, un intrépide et puissant guerrier, fils de Hreidmar, un homme très riche.
Non loin de leur Halle vivait un Nain, Andvari, sous une cascade où il se changeait souvent en saumon…
Et un jour les Dieux Loki, Odin et Hönir vinrent faire une halte à cette cascade.
Y pêchant quelques poissons, Loki aperçut une loutre s’apprêtant à les voler. Aussitôt il lui lança une pierre meurtrière et ses compagnons l’écorchèrent pour en garder la peau ! Cherchant asile pour la nuit ils trouvèrent la Halle de Hreidmar, lui montrant peu après le fruit de leur chasse, la fameuse loutre, n’étant autre que son propre fils Otr !
Alors Hreidmar aidé de Regin et Fafnir se saisirent des trois Dieux.
Un Wergeld fut conclu. Loki fut chargé d’aller trouver assez d’or pour remplir la peau de la loutre et d’or rouge pour la couvrir ensuite… sous peine qu’Odin et Hönir soient exécutés ! Alors Loki s’exécuta, emprunta le filet de Ran, puis revint à la cascade capturant le Nain Andvari, changé en saumon, qu’il connaissait bien.
Alors Loki lui dit (selon l’Edda traduit par Wagner selon L’Or du Rhin de Jean Markale) :
Quel est ce poisson qui glisse à travers les eaux
Et n’est pas assez malin pour se préserver du piège ?
Rachète ta tête du pouvoir de Hel
Et procure-moi l’éclat des flots !
Ainsi Andvari pour retrouver la liberté donnera tout son trésor à Loki qui exigea jusqu’à son dernier et plus précieux, son anneau, l’inquiétant et terriblement puissant Andvarinaut capable de créer de l’or ! Furieux le Nain psalmodia alors la plus noire et maléfique malédiction à qui porterait l’anneau à l’avenir :
Cet or, qui a appartenu à Gust, le forgeron,
Entraînera la mort de deux frères ;
Il déchaînera la lutte entre huit nobles seigneurs.
Personne ne jouira de mon trésor…
La prophétie de l'anneau
Loki regagne en ricanant ses compagnons et avec eux couvre d’or la dépouille d’Otr.
Mais il reste une moustache à recouvrir et Loki n’a pas le choix de se séparer de l’anneau d’Andvari, convaincu par Odin d’ailleurs, une lueur mauvaise dans les yeux…
Une fois le Wergeld réglé, Fafnir exige immédiatement de son père qu’il lui donne l’anneau, suivi de Regin. Mais Hreidmar refuse.
Alors l’anneau qui décide de tout attise la convoitise de Fafnir qui assassine son propre père ! Il déconseille à son frère de lui barrer la route puis se réfugie dans une antre loin de là… alors peu à peu, sous l’influence maudite de l’anneau, il devient un terrible Dragon] veillant jalousement sur ses trésors !
Voilà donc l’histoire narrée par Regin qui demande donc à Sigurd d’aller lui récupérer ce trésor lui revenant de droit comme héritage de son père…
Sigurd
Alors vint le moment tant attendu pour Regin.
Il apprend à Sigurd que Fafnir est proche de leur Halle. Il prévient son apprenti qu’il possède néanmoins, outre l’Anneau, un Heaume de Terreur et qu’il lui faudra une arme incroyable pour combattre les maléfices de Fafnir…
Regin lui forge alors une épée, brisée sur une enclume par Sigurd, puis une seconde, une nouvelle fois brisée. Alors Sigurd récupère les morceaux de l’épée Gram de son père défunt et Regin les rassemble de tout son art… cette fois Sigurd coupe l’enclume en deux avec !
Jetant une balle de laine dans l’eau, la lame de l’épée la tranche juste par la force du courant !
Toutefois Sigurd désire d’abord venger la mort de son père.
A cet effet il se rend chez son oncle maternel, Gripir, doué de prophétie, qui lui fait part de sa destinée…
La vengeance de Sigurd
Alors Sigurd accompli sa vengeance, se rendant dans le royaume de Hunding en tuant tous ses fils !
Il faut dire que le barreur de son navire pour s’y rendre, et qui l’aidera, n’est autre une nouvelle fois que d’Odin ! D’ailleurs de retour pour accomplir la vengeance de Regin, Odin une nouvelle fois apparaît lui conseillant de ne pas suivre le conseil du forgeron de creuser une fosse en attendant le passage de Fafnir le Dragon.
Pour éviter d’être noyé par le flot de sang, mieux lui dit-il creuser plusieurs fosses et des passages entre, lui permettant ainsi de ne pas croiser en sus l’Heaume de Terreur de la créature !
La mort de Fafnir
Vint donc le Dragon et Sigurd le transperce de son épée effilée, un flot de sang le recouvrant sans toutefois le noyer. Alors le monstre rugit :
Ô garçon, mon garçon, de qui es-tu l’enfant ?
A quelle famille appartiens-tu ?
Tu as rougi ton glaive étincelant dans le sang de Fafnir ;
La lame est fixée dans mon cœur.
Sigurd tente alors de cacher son vrai nom, les Germains se faisant nommés de noms de guerres, craignant que l’on prenne leur âme si on connaissait leur identité :
Je m’appelle « Etre merveilleusement doué ».
Mais j’ai erré, enfant sans mère ;
Je n’ai pas de père, comme les autres mortels ;
Je vis seul et solitaire.
Mais Fafnir n’est pas idiot et il finira par faire avouer le nom de Sigurd.
Alors il lui fait part du Ragnarök, de la malédiction de l’Anneau, lui intimant de ne point s’en servir :
Regin m’a trahi, il te trahira aussi
Et provoquera notre mort à nous deux.
Je sens que la vie va abandonner Fafnir,
C’est toi qui t’es montré le plus fort.
La malignité de Regin
Alors le Dragon s’éteint.
Revint Regin qui boit un peu de son sang, arrache le cœur de son frère et demande à Sigurd de le lui faire cuir. Ce dernier s’exécutant se brûle pourtant avec et portant son doigt à la bouche avale un peu de sang. Aussitôt voilà que Sigurd comprend le langage des oiseaux !
(Un mythe bien plus ancien encore comme l’évoque Babrius, un Fabuliste, où les hommes et les animaux se comprenaient)
Justement des passereaux discutent au-dessus de lui :
Voilà Sigurd assis, barbouillé de jus ;
Il fait rôtir sur le feu le cœur de Fafnir ;
Il me paraîtrait sage, le gaspilleur de bagues,
S’il mangeait le reluisant « muscle de vie ».Voilà Regin couché ; il médite à part lui
Et veut trahir le jeune homme qui se fie à lui ;
Dans sa colère il combine des projets perfides ;
L’artisan des méchancetés pense à venger son frère.Envoie donc le bruyant bavard,
D’une tête plus courte, au royaume de Hel.
Tu pourras disposer seul de tout l’or
Qui gisait en abondance sous Fafnir…
Sans qu’on sache ici si ce n’est pas l’Anneau qui murmure à Sigurd ce chant, toujours est-il qu’il tue Regin sans attendre de peur d’être trahi ! Il mange une partie du cœur, boit le sang des deux frères puis rejoint l’antre de Fafnir.
Ce repaire est décrit comme étant de fer, sans doute une ancienne mine, Naine peut-être…
Bref, là Sigurd y trouve un trésor incommensurable, une épée incroyable du nom de Hrotti, d’une armure d’or, du fameux Heaume de Terreur et bien sûr de l’Anneau Andvaranaut !
Brynhilde
La rencontre avec Sigurd
Après ses exploits, Sigurd rejoint le royaume Franc.
Chevauchant, il aperçoit alors une nuit une lueur incroyable au haut d’une haute colline. S’approchant il discerne une fortification impressionnante, toute l’enceinte étant couverte de braseros flamboyants. Pénétrant à l’intérieur et bravant les flammes, il se retrouve au côté d’un être endormi recouvert entièrement d’une armure semblable à un corset l’emprisonnant.
Ôtant le heaume et fendant l’armure il s’aperçoit alors que cet être est une femme !
Sigrdrifa
On trouve alors la première rencontre de Sigurd et Brynhilde dans la Légende Sigrdrifumal, « La Ballade de la Porteuse de Victoire ». Dans ce récit Brynhilde porte le nom de Sigrdrifa.
Pour résumer leur échange, Sigrdrifa remercie Sigurd de l’avoir délivré en lui narrant son histoire, sa malédiction avec Odin, puis elle lui enseigne les Runes et finit par plusieurs conseils que l’on peut prendre comme l’un des tout premiers codes d’honneurs de la Chevalerie ! Sur ce elle lui redemande s’il est bien prêt à passer serment avec elle, car le serment est là la chose la plus sacrée en ce monde.
Sigurd le lui promet puis repart…
… et le texte à ce moment devient ambiguë. En effet Sigurd se rend dans un clan ayant pour chef Heimir qui a pour épouse Bekkhild (La fille aux bancs) qui a elle-même une sœur nommée Brynhild (La fille à la broigne ou à la cuirasse) ! Il apprend qu’elle réside dans un château étrange et va à sa rencontre là où nul homme ne s’est rendu.
La trouvant dans une salle de trône tapissé de riches dorures, ils partagent l’Hydromel et malgré les avertissements de Brynhild sur les serments, il finit par la convaincre de son amour et scelle leur union par une bague en or !
On voit donc là une étrangeté car par deux fois Sigurd s’engage !
Mais on peut expliquer Brynhild-Sigrdrifa comme le double d’une même femme tel que les jumeaux Frey-Freyja, Niord-Nerthus, les Alcis décrits par Tacite, et bien des Dieux et Géants hermaphrodite… en fait si Sigrdrifa est encore une Valkyrie maudite par Odin, délivrée par Sigurd, elle redevient une femme, certes surnaturelle, du nom de Brynhilde, son nom de mortel !
La trahison des serments
En Burgondie à cette époque régnait le Roi Gjuki, qui avec sa femme, Grimhild, avait trois fils, Gunnar, Högni, Gutthorm et une fille, Gudrun.
Sigurd en Burgondie
Sa réputation l’ayant précédé Sigurd est accueilli chaleureusement par toute la cour et le peuple des Gjukungs (les Burgondes). Il est dit ici que Sigurd devint frère de sang de Högni et Gunnar.
On apprend également que la mère de Gudrun fait boire un breuvage magique au héros pour qu’il oublie Brynhilde et qu’il épouse sa fille… ce qu’il fait ! Ensuite on retrouve comme dans Siegfried, à peu prés dans les mêmes événements, le voyage jusqu’à Brynhilde et la mystification de Sigurd pour qu’elle pense que Gunnar mérite d’être son époux…
Deux détails différents mais important sont à prendre en compte.
Le premier, non des moindres, est que Sigurd reprend l’anneau qu’il avait offert à Brynhilde, l’Anneau Andvarinaut, trésor d’Andvari et Or du Rhin (qu’il remplace alors par un autre anneau) ! Le second est que Brynhilde a eu une fille de Sigurd lors de leur rencontre précédente et qu’elle répond au nom d’Aslaug, mais qu’elle fait garder par son père sans le dire à Sigurd…
Une dernière chose est que l’on comprend là que Sigurd, même s’il est envoûté, trompe plusieurs fois consciemment Brynhilde en se faisant passer pour Gunnar ! Donc s’il l’a trahi malgré lui, il déclenche la malédiction de l’Anneau en la trompant de nouveau et surtout en lui ôtant la bague de leur serment…
Mensonges et Trahisons
Ensuite on poursuit l’analogie avec le récit de Siegfried, les deux mariages étant scellés, malgré les doutes de la Valkyrie. Pourtant on retrouve alors la scène des deux femmes se baignant et leur rivalité. Ainsi Brynhilde moque Gudrun uni ainsi avec un simple guerrier alors qu’elle est de sang noble ! En fait la peine que ressent la Valkyrie devient à ce moment une haine indicible contre Gunnar et sa sœur, qu’elle commence à faire payer à Sigurd l’ayant oublié.
Alors Gudrun, haineuse à son tour, montre à Brynhilde l’Anneau d’or que Sigurd lui a ôté du doigt pour le passer au sien ! Tout est alors relevé de la mystification dont la Valkyrie a été l’objet !
La furie de la Valkyrie
A partir de ce moment, pour l’honneur et pour le pacte brisé, Brynhilde apparaît sous les traits d’une Valkyrja vengeresse !
Ce qu’elle signifie à Gunnar, le ridiculisant des lamentables faiblesses qu’elle connaît désormais à son propos, par ces termes (version des Eddas) :
Je veux serrer dans mes bras Sigurd,
Dans la fleur de la jeunesse, ou bien mourir !
Je viens de dire des paroles que je regrette déjà ;
Gudrun est sa femme, je suis celle de Gunnar…
Des Nornes hostiles nous ont réservé de longs tourments.Le Roi Germain caresse sa chère épouse,
Et moi je suis privée à la fois d’amour et de mari,
Sans rien pour me soutenir, sauf mes ressentiments.Désormais, Gunnar, tu dois renoncer
A mes domaines et à moi-même ;
Jamais je ne goûterai l’amour avec toi, noble prince.
Je vais retourner là où j’ai vécu jadis,
Auprès de mes proches, auprès de mon Clan ;
Je demeurerai là et j’y dormirai ma vie,
A moins que tu ne fasses mourir Sigurd !
Le Dénouement
A partir de ce moment les deux légendes différent quelque peu quant au meurtre de Sigurd.
En effet on prête au seul frère royal n’ayant pas échangé son sang avec le héros de l’exécuter, en fait ici Gutthorm, influencé par Gunnar et Högni, ayant ici un rôle moins maléfique que dans l'épopée de Siegfried…
Toujours est-il que Gutthorm transperce Sigurd alors endormi avec sa propre épée, Gram. Mais Sigurd avant de mourir retire l’épée et la lance sur son assassin avec une telle force qu’elle le coupera en deux ! Ainsi tué en lâche, le meurtrier s’en va sur la route de Hel…
Le suicide de Brynhilde
Alors Brynhilde qui éclate d’un rire démoniaque quand elle apprend la mort de Sigurd éclatera en sanglots peu après de la perte de son amour !
Le guerrier étant mort sans gloire et en ayant trahi les serments lui-aussi se voit promis aux enfers de Helheim… mais la Valkyrie tire son épée et se transperce sur le bûcher de celui qu’elle aime pour l’accompagner !
On voit que ce dénouement est différent de la légende de Siegfried. D’autres versions existent également ou Högni est accusé du meurtre de Sigurd. Dans d’autres Brynhilde ne se suiciderait pas et repartirait dans son monde… enfin l’assassinant du héros est souvent présenté dans une partie de chasse au bord du Rhin, là où il aurait perdu l’Anneau maudit !
Le Post-Scriptum
Toujours est-il qu’on retrouve une même analogie, celle faisant poursuivre la légende où Gudrun-Kriemhild décide à son tour de se venger au travers de son futur époux, Atli (Attila), comme on l’a vu dans la Siegfried ! D’ailleurs dans la version de Sigurd, on trouve déjà Attila dans un bref passage où il est présenté comme frère de la Valkyrie, les deux enfants de Budli, leur père !
On le décrit comme un personnage sombre, inquiétant et puissant.
Cette suite, un rajout dramatique qui mêle le mythe à l’Histoire se poursuit donc ainsi :
La vengeance de Gudrun
Après la mort du couple Sigurd et Brynhilde, Gudrun rejoint le Roi Hjalprek, le mari de la mère de Sigurd, Hjordis.
Quand à ses frères, qu’elle hait depuis leur forfaiture, ils récupèrent les terres et l’or de Sigurd mais plus encore l’Anneau Andvarinaut qui n’a pas encore fini là sa malédiction…
Atli
Atli rentre alors en scène.
Il demande donc la main de Gudrun mais avec des arrières pensées de pouvoir impérial. Car en mêlant la puissance des Huns avec la légitimité royale des Burgondes, il pense pouvoir régner sur tous les Germains et vaincre Rome… et l’Anneau rôde peut-être aussi dans ses pensées. (on peut y ajouter un sentiment de revanche pour sa sœur défunte, Brynhilde, mais cela reste peu sûr comme on l’a vu).
Toutefois Gudrun a vent bien sûr de ce que fomente son époux.
Et dans la tradition Germanique, le Clan a souvent autant de valeur que les liens du mariage et surtout les serments dépassent toutes autres notions. Alors elle se sent obligé d’avertir ses frères que Atli va les inviter avec de mauvaises intentions.
Sans trop se préoccuper des avertissements de leur sœur, les frères vont tout de même au banquet organisé par Atli bien qu’ils prennent soin tout de même, et eux seuls, de cacher dans les eaux du Rhin le fameux Anneau d’Or…
Le Destin de l'Anneau
Le piège annoncé a tout de même lieu. (A l’instar de la légende de Siegfried)
Les Huns attaquent les Burgondes et massacrent les gardes de Gunnar. Il fait arracher le cœur d’Högni et menace Gunnar de subir le même sort s’il ne relève pas la cache de l’Anneau.
Gunnar restant muet il est jeté dans une fosse remplie de serpents !
Gudrun tente de sauver son frère en lui procurant une harpe dont il se sert avec ses pieds, ses mains étant liées, pour endormir les serpents. Mais une vipère vicieuse le mord et s’enfonce dans les chairs jusqu’au foie du Roi, qui meurt alors ! L’instigateur du meurtre de Sigurd et de la malédiction de Brynhilde périt donc à son tour comme un condamné qu’il est…
Mais encore une fois la vengeance va s’abattre !
Gudrun, par rage et pour l’honneur de son clan déchu, va tuer les deux fils d’Atli, ses propres enfants ! Elle fait sertir leur crâne d’or précieux et s’en sert comme coupe à boire pour son mari alors qu’elle lui fera servir le cœur et le sang de sa progéniture !
Ensuite elle mettra le feu à la forteresse des Huns, qui s’entretueront pour échapper aux flammes de Hel, puis enfoncera une épée dans le corps d’Attila alors endormi… (ce qui est conforme à certaines versions historiques) ! Alors elle se jette du donjon dans l’eau… et selon la légende ne périt pas mais est porté par les eaux vers son prochain époux, le Roi Ioanakar !
Epilogue
Ainsi tout ceux ayant de prés ou de plus loin œuvrés autour de l’Anneau auront donc péris pour la plupart !
Reste donc l’Anneau d’Or, secret du pouvoir des Germains, convoité de tous, par les Dieux, les Burgondes, les Huns et Attila lui-même mais qui est désormais perdu et livré aux courants du Rhin jusqu’à ce qu’on le retrouve…
… même si cet Anneau n’est certainement que la métaphore de notre quête de sens !
Enfin, on collectant les sources, légendes et textes autour de ce mythe on peut arriver à en faire une suite cohérente.
Il resterait évidemment, après les explications de textes, les légendes qui alimentent le Hof et même les films s’en inspirant d'écrire le Roman de cette fameuse métaphore qu’est l’Or du Rhin… et ce roman viendra…